Edouard Mendy, 29 ans, a été sacré champion d’Europe des clubs avec Chelsea, le 29 mai dernier. Arrivée en Angleterre l’été dernier, en provenance du Stade rennais, l’international sénégalais a fait une ascension fulgurante.  
Dans la folle clameur des tribunes de Standford Bridge, « The Wall of Chelsea » (le mur de Chelsea) tient bien sa réputation. « The wall » ! Le surnom n’est pas usurpé car la nouvelle recrue des Blues se dresse inlassablement en ultime et infranchissable rempart contre les assauts adverses. Ses clean sheets affolent la planète foot.
Les statistiques font parler de lui. Ses performances cette saison le portent au sommet de son art. Edouard Mendy est élu meilleur d’Europe devant Navas du Psg, Neuer du Bayern de Munich ou encore Thibaut Courtois du Real Madrid. Et pour couronner le tout, il remporte la Ligue des champions avec Chelsea, le 29 mai dernier.
Sa grande carcasse étalée sur la pelouse du stade du Dragon de Porto, le visage entre ses deux mains, le ballon en dessous de son ventre, les larmes aux yeux. L’émotion est visible sur le visage du gardien du Chelsea qui venait d’inscrire son nom dans l’histoire du football européen. Un titre inattendu, il y a quelques années, pour l’international sénégalais de 29 ans au parcours atypique.
Mais, même s’il y a beaucoup de joueurs méritants dans le groupe de Tuchel qui a battu celui de Pep Guardiola, à l’Image de Kai Havertz l’unique buteur de la finale, peu ont mieux fait que l’homme qui était dans la cage des Blues. Les supers talents cityzens n’ont pas pu tromper la vigilance d’Edouard Mendy. L’imposant gardien d’un mètre 97 centimètres (1m97cm) pour 87 Kg est infranchissable. Il venait de faire son neuvième clean sheet en C1, un record dans l’histoire de cette compétition.
Edouard a ainsi égalé Santiago Canizares avec Valence en 2000-2001 et Keylor Navas avec Réal de Madrid lors de la saison 2015-2016. Cependant, il reste le seul gardien à faire 9 matchs sans encaisser pour sa première saison. En Premier League, il a totalisé 16 clean sheets. Il confirme son efficacité qu’il avait déjà démontré dans le championnat français avec Reims en Ligue 2 et le Stade rennais dans en Ligue 1.
Arrivé chez les Blues, l’été dernier, en provenance du Stade rennais, il a cloué Képa Arrizabalaga sur le banc et effacé Willy Caballéro dans les mémoires, pour s’imposer comme numéro 1 au poste. Avec Lampard comme Tuchel, Mendy est souvent au rendez-vous sur la ligne de but des Blues. Ses parades et arrêts décisifs rassurent. Son jeu de pied fait de lui un dernier rempart qui inspire la confiance à ses partenaires.
Du chômage au titre de la C1
Pourtant, il y a quelques années, rien ne présageait cette ascension fulgurante du Sénégalais qui était au chômage en 2014. “Oui j’étais dans l’ombre. Aujourd’hui je ne peux pas te dire que je suis dans la lumière parce que je n’ai pas encore concrétisé ça. C’est vrai que je suis sorti de l’ombre, j’avance, mais pour l’instant, je ne suis pas dans la lumière”, disait-il dans un entretien à BeIng.   
En fait, le natif de Montivilliers a débuté, en 2005, sa formation au Havre Ac. Mais face à une rude concurrence, il ne perd pas son temps dans ce club. C’est au CS Services municipaux du Havre, un club amateur et partenaire de HAC, qu’il va poursuivre sa formation. ‘’ Je savais qu’au Havre c’était bouché pour moi. Si je voulais avoir du temps de jeu, il fallait que je parte. C’était le jour et la nuit avec le centre de formation, mais c’était enrichissant. Ça m’a renforcé et j’ai pris beaucoup de plaisir à jouer là-bas », confie-t-il avec beaucoup d’humilité.
Après cinq ans passés dans ce club qui évolue en division d’honneur dans la Ligue de Basse-Normandie, il débarque, en 2011 à l’As Cherbourg en National. Il est alors âgé de 19 ans. Troisième dans la hiérarchie des portiers, c’est seulement à sa troisième saison qu’il parvient à s’imposer suite à la relégation de Cherbourg en CFA.
Le préparateur des gardiens de Cherbourg d’alors, Jérôme Lemoigne se souvient : « Partout où il est passé, il a prouvé qu’il pouvait se mettre au niveau. Chez nous, il est arrivé comme n°3 en National et a vite montré qu’il pouvait être n°2 puis n°1 lors de la relégation en CFA. En son for intérieur, il a toujours été conscient de ses qualités. »
 En 2014 son club est encore rétrogradé en division d’honneur et Mendy qui avait un contrat fédéral se retrouve au chômage. L’avenir de jeune gardien, à qui on présageait un parcours étincelant et qui rêvait de Premier League, s’assombrit. ‘’J’avais pour objectif d’aller en League One. Je m’étais donné les moyens pour y arriver. J’avais même fait appel à un agent qui m’a garanti à 150% que j’allais signer. Du coup, je n’ai pas répondu aux sollicitations ici, en France, mais au final ça ne s’est pas fait », se rappelle Edouard Mendy.
Coup de pouce du destin, c’est finalement à l’Olympique de Marseille qu’il rebondit à l’été 2015. « Quand l’OM m’a appelé, j’étais au chômage et j’avais juste des pistes avec des clubs de CFA ou de National, se souvient-il. Un ami avec qui je jouais à Cherbourg a fait le lien entre l’entraîneur des gardiens de Bordeaux et Stéphane Cassard, qui était à l’OM. Il lui a demandé s’il connaissait un gardien libre. Il a donné mon profil et Marseille a rapidement été intéressé. »
Pro a l’âge de 24 ans
A l’Om il s’engage comme n°3 bis. Même s’il n’a pas un statut de pro à Marseille, Edouard se réjouit de s’entraîner aux côtés de Lassana Diarra, Steve Mandanda, Michy Batshuayi, Rémy Cabella entre autres figures à l’époque de Ligue 1 française. Il joue la plupart du temps avec la réserve en CFA, avant d’être contacté par Reims. C’est avec ce club qu’il signe son premier contrat pro en juillet 2016.
« Sébastien Hamel (l’entraîneur des gardiens de Reims, ndlr) connaissait Stéphane Cassard. Il avait déjà entendu parler de moi et il l’a appelé plusieurs fois pour connaître ma situation contractuelle. Steph lui a d’abord dit que j’allais continuer à Marseille. Mais ça n’avançait pas donc il m’a appelé pour me faire part de l’intérêt du Stade de Reims. Aller là-bas, avec l’objectif de monter, ça m’a tout de suite convaincu », confie l’ancien portier de Reims très friand des challenges.
Remplaçant lors de sa première saison avec Reims en L2, il réussit à carapater ses concurrents l’année suivante et participe à la montée du club dans l’élite. Il n’aura besoin d’une seule saison dans l’élite pour être la convoitise de plusieurs gros calibres de la ligue 1. Mais c’est à Rennes qu’il dépose ses baluchons, le 6 août 2019, pour une durée de 4 ans. Après une saison XXL, le club anglais de Chelsea ne résiste plus au talent du gardien sénégalais. Le club londonien a déboursé 25 millions d’Euro (plus de 15 milliards F CFA).
Cet investissement, le staff du club ne le regrettera sans doute pas. Le Sénégalais participe activement au succès du club pour la deuxième fois en Ligue des champions. Mendy sera ainsi le deuxième gardien africain derrière Bruce Grobbelaar et le troisième sénégalais après Sadio Mané et Salif Diao a remporté ce trophée.
Un gardien, trois nationalités, deux sélections
C’est d’ailleurs, le jeudi 3 juin qu’il a rejoint ses compatriotes en stage de préparation de matches amicaux dans la tanière avec une médaille d’or autour du cou. Il est accueilli en héros par ses partenaires et le sélectionneur national, Aliou Cissé, ne lui tarit pas d’éloges. « Si on jette un coup d’œil sur le passé d’Edouard (Mendy), qu’il puisse arriver à ce niveau, être champion d’Europe, c’est grand et comme quoi, il ne faut jamais abandonner. Nous avons espoir qu’il va continuer à performer et apporter son expérience en équipe nationale. Ce profil, on en a besoin, c’est bon pour notre équipe nationale, notre football », lance le coach des Lions.
Pourtant, Mendy a failli ne jamais arborer le maillot sénégalais. Né Français, de parents sénégalo-Bissau-guinéens, trois possibilités s’offraient au champion d’Europe des clubs 2021. Mais avec ses débuts peu brillants, les chances de jouer avec les Bleus étaient quasi impossibles. Il fallait donc pour Edouard une sélection moins huppée pour devenir international comme le souhaitait son pater.
 Pour faire plaisir à ce dernier malade, le portier de Reims, accepte, en 2017 les sollicitations de la Guinée-Bissau. « Durant ma première année au stade de Reims, même quand j’étais à Marseille, j’avais déjà des sollicitations de la sélection Bissau-guinéenne que j’ai toujours décliné. Mon père est Bissau-guinéen et que je devienne joueur professionnel était une fierté et il me le répétait et il me disait que c’était la récompense. Il était malade et je me suis dit ; je lui offre cela avant qu’il parte et j’ai rejoint la sélection. En ce moment, je n’avais pas assez de temps de jeu, donc je ne pouvais pas rejoindre le Sénégal’’, se justifiait-t-il. 
Obnubilé par un père qui voulait voir un jour son fils devenir international, Mendy avait donc pris cette décision à contrecœur. Mais la rencontre amicale des Djurtus est annulée et Edouard ne deviendra jamais international Guinéen.
 Il sera sélectionné par Aliou Cissé en septembre 2018 lors d’une rencontre éliminatoire de la Can 2019. Il démarre sur le banc, avant de devenir, deux mois plus tard, le n°1 de l’équipe nationale du Sénégal. Et personne ne se doutait que le chômeur de 2014 reviendrait, jeudi dernier, en sélection avec le statut de meilleur gardien d’Europe.

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