De la réélection d’Alassane Ouattara au coup d’État au Mali, en passant par les combats dans la région rebelle du Tigré, en Éthiopie, l’Afrique a connu une année 2020 mouvementée. France 24 vous propose un retour sur les temps forts qui ont marqué l’actualité du continent.PUBLICITÉ

  • La réélection contestée de Faure Gnassingbé au Togo
Le président togolais Faure Gnassingbé dépose son bulletin de vote, le 22 février 2020 à Kara, lors de l'élection présidentielle.
Le président togolais Faure Gnassingbé dépose son bulletin de vote, le 22 février 2020 à Kara, lors de l’élection présidentielle. © PIUS UTOMI EKPEI / AFP

L’année politique en Afrique a débuté au Togo, le 22 février, par un vote. Sans surprise, le président sortant Faure Gnassingbé, qui briguait un quatrième mandat, a été largement réélu dès le premier tour de la présidentielle avec 72,36 % des suffrages exprimés, contre 4.35 % pour son adversaire ,Jean-Pierre Fabre, et 18.37 % pour le chef de file de l’opposition, Agbéyomé Kodjo. Ce dernier a dénoncé des fraudes et revendiqué lui aussi la victoire.

Le vote s’est déroulé sans violence, mais la société civile a recensé des bourrages d’urnes et des inversions de résultats. Des délégués de l’opposition se sont également vu refuser les accès dans certains bureaux de vote, selon l’opposition, et Internet a été coupé par intermittence dans la capitale ou totalement dans certaines régions sensibles. Faure Gnassingbé, arrivé au pouvoir en 2005 après le décès de son père, le général Gnassigbé Eyadéma, qui avait lui-même dirigé le Togo pendant 38 ans, a toujours été réélu lors de scrutins très contestés par l’opposition.

  • L’arrestation de Félicien Kabuga, financier présumé du génocide au Rwanda
Activement recherché par la justice internationale depuis vingt-cinq ans, Félicien Kabuga, un homme d'affaires rwandais considéré comme le financier présumé du génocide de 1994, a été arrêté, samedi 16 mai, en région parisienne.
Activement recherché par la justice internationale depuis vingt-cinq ans, Félicien Kabuga, un homme d’affaires rwandais considéré comme le financier présumé du génocide de 1994, a été arrêté, samedi 16 mai, en région parisienne. Simon Wohlfahrt AFP/File

L’homme d’affaires rwandais Félicien Kabuga, considéré comme le financier présumé du génocide de 1994 au Rwanda et activement recherché par la justice internationale depuis vingt-cinq ans, a été arrêté le 16 mai, dans les Hauts-de-Seine, en région parisienne. Ce Rwandais de 87 ans, selon ses dires, est accusé d’avoir financé les milices hutues responsables du génocide de 1994. Il devait être remis à Arusha, en Tanzanie, pour y être jugé par le le Mécanisme pour les tribunaux pénaux internationaux (MTPI), qui possède une division à Arusha, mais il a finalement été transféré fin octobre au Tribunal pénal international de La Haye.

Ancien président de la tristement célèbre Radio télévision libre des Mille collines (RTLM), qui diffusa des appels aux meurtres des Tutsis, Félicien Kabuga conteste l’intégralité des sept chefs d’inculpation qui le visent. Il est également soupçonné d’avoir contribué, en 1993, à l’achat massif de machettes qui seront distribuées aux miliciens en avril 1994, une accusation qui appuie la thèse d’une planification du génocide, jamais tranchée par la justice internationale, au grand dam de Kigali.

  • Évariste Ndayishimiye vainqueur de l’élection présidentielle au Burundi
Évariste Ndayishimiye, le 20 mai 2020, à Giheta, au Burundi, après avoir voté.
Évariste Ndayishimiye, le 20 mai 2020, à Giheta, au Burundi, après avoir voté. © AFP

Le général Évariste Ndayishimiye, le candidat du parti au pouvoir au Burundi, a été proclamé, le 25 mai, vainqueur de l’élection présidentielle par la Commission électorale nationale indépendante (Céni), avec 68,72 % des voix. Le principal candidat de l’opposition, Agathon Rwasa, président du Conseil national pour la liberté (CNL), a qualifié ces résultats de « fantaisistes » et accusé le pouvoir de « tricherie » et de « pure manipulation ». Maintenues malgré la pandémie de coronavirus, ces élections se sont globalement déroulées dans le calme, mais le CNL a dénoncé les pressions exercées sur ses assesseurs, dont certains ont été arrêtés, ainsi que des fraudes massives.

Âgé de 52 ans, Évariste Ndayishimiye a succédé au président Pierre Nkurunziza. Au pouvoir depuis 2005, celui-ci avait décidé de ne pas se représenter pour un quatrième mandat, et l’avait adoubé comme son « héritier ». Sa candidature à un troisième mandat très controversé en 2015 avait plongé son pays dans une crise politique majeure, qui a fait plus de 1 200 morts et contraint 400 000 Burundais à l’exil. Pierre Nkurunziza est mort quelques jours après les élections présidentielles, le 8 juin, victime d’une attaque cardiaque. 

  • La mort du chef d’Al-Qaïda au Maghreb islamique et de son chef militaire au Sahel
Abdelmalek Droukdal, chef d'Al-Qaïda au Maghreb islamique, a été tué le 3 juin 2020 par l'armée française lors d'une opération dans le nord du Mali.
Abdelmalek Droukdal, chef d’Al-Qaïda au Maghreb islamique, a été tué le 3 juin 2020 par l’armée française lors d’une opération dans le nord du Mali. © AFP/Al-Andalus

Il était l’un des principaux chefs de la nébuleuse islamiste sahélo-saharienne depuis une vingtaine d’années. Le chef d’Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi), Abdelmalek Droukdel, a été tué par l’armée française lors d’une opération, le 3 juin, dans le nord du Mali. Il commandait l’ensemble des groupes qaïdistes d’Afrique du Nord et de la bande sahélienne, dont le JNIM, l’un des principaux groupes terroristes actifs au Sahel. Ancien du GIA (Groupe islamique armé) algérien, Droukdel, avait pris en 2004 la tête du Groupe salafiste pour la prédication et le combat (GSPC), rebaptisé Aqmi trois ans plus tard. Il a participé à l’offensive jihadiste de 2012 lancée du nord du Mali vers la capitale Bamako, offensive à laquelle l’armée française a mis fin avec l’opération Serval début 2013. Abdelmalek Droukdel a été remplacé par l‘Algérien Abou Oubaïda Youssef al-Annabi à la tête de l’organisation.

Quelques mois plus tard, toujours dans le cadre de l’opération Barkhane, la France a annoncé, le 13 octobre, avoir tué le chef militaire de la branche sahélienne d’Al-Qaïda, le Malien Bah ag Moussa, dans le nord-est du Mali. L’ancien officier de l’armée malienne, également connu sous le nom de Bamoussa Diarra, était un lieutenant d’Iyad Ag Ghali, le chef touareg du Rassemblement pour la victoire de l’islam et des musulmans (RVIM), lié à Al-Qaïda. Il avait déserté dès 2012 pour rejoindre la rébellion et fonder avec Iyad ag Ghali le groupe jihadiste Ansar Dine, devenu RVIM (ou GSIM ou JNIM, selon l’acronyme retenu) à la faveur d’une fusion avec Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) et d’autres groupes islamistes.

  • La disparition du Premier ministre ivoirien Amadou Gon Coulibaly et la réélection controversée d’Alassane Ouattara
La dépouille du Premier ministre ivoirien Amadou Gon Coulibaly est transporté à l'aéroport Felix Houphouet Boigny pour un transfert vers son village natal de Korhogo, le 15 juillet 2020.
La dépouille du Premier ministre ivoirien Amadou Gon Coulibaly est transporté à l’aéroport Felix Houphouet Boigny pour un transfert vers son village natal de Korhogo, le 15 juillet 2020. REUTERS – LUC GNAGO

À moins de quatre mois de la présidentielle, la Côte d’Ivoire a vécu un coup de tonnerre. Le pays a perdu, le 8 juillet, son Premier ministre et candidat désigné du parti au pouvoir, Amadou Gon Coulibaly, décédé d’une crise cardiaque. Alors que le président sortant Alassane Ouattara ne devait pas se représenter, sa disparition a rebattu les cartes en vue des élections. Le chef de l’État sortant a finalement décidé de se porter candidat à un troisième mandat invoquant un « cas de force majeure » et un « devoir citoyen », après le décès de son Premier ministre. 

Malgré de vives contestations, Alassane Ouattara a obtenu le 31 octobre un troisième mandat présidentiel dès le premier tour avec 94,27 % des voix, au terme d’un scrutin boycotté par l’opposition et marqué par des violences qui ont fait 85 morts entre les mois d’août et novembre. L’opposition ivoirienne a annoncé dans la foulée la création d’un « Conseil national de transition ». Les violences ont cessé après une rencontre le 11 novembre entre le président Ouattara et le chef de l’opposition, l’ancien président Henri Konan Bédié, mais l’opposition continue à contester le résultat du scrutin. Lors de son discours d’investiture, Alassane Ouattara l’a invité au « dialogue », promettant une reprise des négociations sur la commission électorale en vue des législatives du premier trimestre 2021.

  • La chute d’IBK au Mali et la libération d’otages, dont la Française Sophie Pétronin
Le président malien Ibrahim Boubacar Keïta annonce sa démission à la télévision nationale, le 19 août 2020.
Le président malien Ibrahim Boubacar Keïta annonce sa démission à la télévision nationale, le 19 août 2020. AFP – –

Contesté dans la rue pendant plusieurs mois, le président malien, Ibrahim Boubacar Keïta (IBK), a été renversé par un coup d’État militaire, dans la nuit de mardi 18 à mercredi 19 août. IBK a annoncé sa démission et la dissolution du gouvernement et du Parlement, après son arrestation par des soldats, à la suite d’une mutinerie sur la base militaire de Kati, aggravant la crise dans laquelle était plongé le pays, confronté à une insurrection jihadiste et une vague de protestations. Sous la menace de sanctions internationales, les officiers ont finalement remis le pouvoir entre septembre et octobre à un gouvernement intérimaire, censé diriger le pays pendant 18 mois avant la tenue d’élections. Un mois après le coup d’État, l’ancien ministre de la Défense Bah Ndaw a été nommé président du Mali par intérim. 

L’année 2020 au Mali a aussi été marquée par la libération d’otages. L’humanitaire française Sophie Pétronin, enlevée dans le pays en décembre 2016, a été libérée, le 8 octobre, après plus de 1 380 jours de détention, aux côtés du chef de l’opposition au Mali, Soumaïla Cissé. Il avait été kidnappé le 25 mars, alors qu’il était en campagne pour les législatives dans son fief électoral de Niafounké. Soumaïla Cissé est mort du coronavirus le 25 décembre en France, où il avait été transféré pour être soigné.

Dans le cadre de négociations en vue de leur libération, plus d’une centaine de jihadistes condamnés ou présumés ont été relâchés.

  • Une présidentielle sous tension en Guinée 
Le président guinéen, Alpha Condé, avant de voter lors des élections présidentielles à Conakry, le 18 octobre 2020.
Le président guinéen, Alpha Condé, avant de voter lors des élections présidentielles à Conakry, le 18 octobre 2020. © John Wessels, AFP

Après une campagne vindicative et fiévreuse, le premier tour de la présidentielle guinéenne s’est tenue le 18 octobre dans un climat de tension extrême alimenté par des contestations contre la candidature d‘Alpha Condé, élu en 2010 et réélu en 2015. Pendant des mois, l’opposition, menée notamment par Cellou Dalein Diallo, s’est mobilisée contre la perspective d’un troisième mandat du chef de l’État âgé de 82 ans. La contestation, lancée en octobre 2019, a été durement réprimée. Des dizaines de civils ont été tués. Alpha Condé a finalement été réélu avec 59,49 % des voix. La Cour constitutionnelle a rejeté par la suite les recours de Cellou Dalein Diallo, et de trois autres des douze candidats à la présidentielle du 18 octobre. 

Lors de son discours d’investiture, Alpha Condé a appelé ses concitoyens à « oublier le passé » et à se tourner vers un « avenir d’unité et d’espérance ». « J’exhorte chacun d’entre vous à oublier le passé qui divise, au profit d’un avenir d’unité et d’espérance », a-t-il déclaré, affirmant sa « conviction que la Guinée se fera avec tous les Guinéens », en présence d’un parterre de chefs d’État africains.

  • La longue absence du président algérien Abdelmadjid Tebboune positif au Covid-19
Le président algérien Abdelmadjid Tebboune a tenu un discours assurant être encore en convalescence pendant quelques semaines, le 13 décembre 2020.
Le président algérien Abdelmadjid Tebboune a tenu un discours assurant être encore en convalescence pendant quelques semaines, le 13 décembre 2020. © Capture d’écran, AFP

Le 24 octobre, le président algérien Abdelmadjid Tebboune s’est mis volontairement à l’isolement après avoir été en contact avec des responsables contaminés par le coronavirus. Il a ensuite été admis le 28 octobre dans « l’un des plus grands établissements spécialisés » d’Allemagne après avoir contracté le virus. Pendant plusieurs semaines, son état de sa santé a alimenté les rumeurs et les interrogations sur la direction du pays. Son absence a replongé l’Algérie dans les affres humiliantes de la fin du règne de son prédécesseur Abdelaziz Bouteflika. Frappé par un AVC en 2013, ce dernier avait continué, impotent et aphasique, à assumer la charge présidentielle, avant d’être chassé du pouvoir en avril 2019 par le mouvement de contestation antirégime Hirak.

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Abdelmadjid Tebboune est finalement apparu, le 13 décembre, à la télévision publique pour la première fois depuis près de deux mois, et six semaines après son hospitalisation en Allemagne. « Je suis en convalescence. Cela va prendre encore deux ou trois semaines pour que je reprenne mes forces physiques », a déclaré le président âgé de 75 ans, visiblement amaigri, dans un « discours au peuple » prononcé au lendemain du premier anniversaire de sa victoire électorale. Officiellement, il tient toujours les rênes de l’État, mais il n’a pu exercer aucune de ses prérogatives depuis près de deux mois : il n’a pas promulgué la nouvelle Constitution – projet phare de son programme électoral –, ni signé la loi de finances 2021.

  • Le conflit au Tigré en Éthiopie
Des réfugiés éthiopiens fuyant le Tigré pris en charge par l'UNHCR au Soudan, le 23 novembre 2020.
Des réfugiés éthiopiens fuyant le Tigré pris en charge par l’UNHCR au Soudan, le 23 novembre 2020. © Mohamed Nureldin Abdallah, Reuters

Le Premier ministre éthiopien Abiy Ahmed a déclenché une opération militaire le 4 novembre contre le Front de libération du peuple du Tigré (TPLF), qui dirige cette région dissidente du nord du pays. Il les a accusés de chercher à déstabiliser le gouvernement fédéral et d’avoir attaqué deux bases militaires éthiopiennes dans la région, ce que nient les autorités tigréennes. Après plusieurs semaines de combats, le gouvernement éthiopien a affirmé, le 28 novembre, avoir repris le contrôle de cette région, dont sa capitale Mekele. La chute de cette ville était un objectif majeur de la « dernière phase » de l’intervention militaire, qui incluait aussi l’arrestation des leaders tigréens, désormais « chassés » par l’armée.

La communauté internationale s’est inquiétée depuis le début du conflit de possibles « crimes de guerre » en Éthiopie et a tenté, sans succès, de faire pression sur Abiy Ahmed, lauréat du prix Nobel de la paix 2019, pour qu’il accepte une médiation. Les Nations unies ont aussi réclamé un accès rapide à cette zone, qui compte plus de 5 millions d’habitants, dont 600 000 étaient dépendants de l’aide humanitaire avant les affrontements. Un premier convoi est arrivé le 12 décembre avec des médicaments et du matériel médical pour soigner plus de 400 blessés, ainsi que des articles pour le traitement de maladies courantes et chroniques. Près de 50 000 habitants du Tigré ont fui au Soudan voisin et un nombre indéterminé ont été déplacés à l’intérieur de l’Éthiopie.

  • L’enlèvement des lycéens de Kankara au Nigeria
Des lycéens de Kankara libérés après leur enlèvement le 18 décembre 2020.
Des lycéens de Kankara libérés après leur enlèvement le 18 décembre 2020. AFP – KOLA SULAIMON

L’enlèvement de centaines de lycéens dans le nord-ouest du Nigeria a suscité la stupeur un peu partout dans le monde. Plus d’une centaine d’hommes armés à moto ont attaqué, le 11 décembre, une école rurale située dans la ville de Kankara, dans l’État de Katsina. Dans un message de propagande, le chef du groupe jihadiste Boko Haram a revendiqué ce rapt. Les forces de sécurité nigérianes ont finalement réussi à libérer une semaine plus tard plus de 340 adolescents. Lors de l’opération, elles ont encerclé la zone où les jeunes gens étaient détenus, avec pour instruction de ne pas tirer un seul coup de feu. 

Ce rapt, qui ranime le spectre de l’enlèvement de plus de 200 jeunes filles à Chibok en 2014 est un terrible camouflet pour le président nigérian Muhammadu Buhari, originaire de l’État de Katsina. Le chef de l’État arrivé au pouvoir en 2015 avait fait de la lutte contre Boko Haram sa priorité. L’organisation terroriste et sa branche dissidente, le groupe État islamique en Afrique de l’Ouest (Iswap), actifs dans le nord-est du Nigeria, ont fait plus de 36 000 morts en dix ans de conflit et deux millions de personnes ne peuvent toujours pas regagner leur foyer.

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